La question nationale est toujours un thème d’actualité pour la Russie. Lundi 4 novembre, jour de la fête de l’unité nationale ou de l’unité du peuple, un défilé nationaliste avait lieu au sud-est de Moscou (Lioublino). On l’appelle la marche Russe (Russe dans le sens de « peuple russe historique » pas dans le sens de « citoyen de Russie »).
La fête elle même du 4 novembre est également le sujet de nombreuses discussions. Elle est jeune puisqu’elle n’a que huit ans. Et selon un récent sondage 85% des citoyens russes y sont indifférents alors que 15% la célèbrent d’une façon ou d’une autre. La dénomination est le jour de l’unité populaire (День народного единства). En Français on dit « fête de l’unité nationale » mais officiellement il y a plus de 180 nations en Russie, ce n’est pas une unité nationale au sens où l’entendent les français qui on un état nation. Marie Jégo dans un article paru mardi l’appelle simplement « la Fête de l’unité, imposée par le Kremlin en 2005 pour remplacer les commémorations de la révolution bolchévique de 1917, le 7 novembre ». Unité de quoi? Marie Jégo zappe le terme intraduisible qui pose problème. La question nationale.
Historiquement la fête célèbre le 4 novembre 1612 où contrairement à ce qui est écrit dans le même article du Monde, les russes n’ont pas chassé les Polonais de Moscou mais de Kitai Gorod et ceux-ci se sont réfugiés au Kremlin jusqu’au 6 ou 7 novembre. Et en Février de l’année suivante un Tsar était élu, le premier de la dynastie des Romanov. Trente sept ans après on instituait le 1er novembre comme jour de fête d’Etat pour la «Célébration de l’ Icône de Kazan de la Mère de Dieu » (le 22 octobre dans le calendrier Julien) et cela dura jusqu’à la révolution bolchevique. Donc en clair, les russes avaient l’habitude de faire la fête le 1er novembre pendant près de trois siècles puis pendant près d’un siècle le 7 novembre. Si on coupe la poire en deux ça donne le 4 novembre. Reste la signification de la fête, la concorde, l’union des différents peuples. Cela est malheureusement pas bien intégré puisqu’il y a des défilés pro-russe et contre les 180 autres nations ce jour là, l’inverse d’un concorde, d’une unité des peuples. Des défilés qui expriment une crise identitaire.
Tout le long du cortège, cerné par un puissant cordon policier, des militants distribuent des tracts sur le « génocide » en cours du peuple russe. On y dit que « 2 millions de Russes meurent prématurément chaque année ».
Un peu plus loin, un homme affirme, prospectus à l’appui, que le lobby mondial de l’alcool et du tabac est en train de régler son compte à la race slave. Les hurlements collectifs « Hourrah la Russie » et « La Russie aux Russes » semblent conjurer l’angoisse ressentie par ces catégories de population face à la poussée démographique des peuples venus des marches sud de la Russie. C’est comme si les Russes, peuple dominant de la Fédération de Russie, se vivaient comme une minorité opprimée. En pleine crise identitaire, une large partie de la population russe mise sur la constitution d’un Etat nation, ethniquement et religieusement pur. Difficile à réaliser, car la Fédération est une mosaïque de peuples et d’ethnies où vivent 20 millions de musulmans (Volga et nord du Caucase).
La chanson suivante revient sur cette fameuse question nationale. Le groupe de rock Les partisans électriques a été fondé il y a dix ans à Saint Petersbourg. Le titre suivant est tiré d’un album sorti en 2011 R.V.I. Le groupe est ouvertement anti-fasciste, anti-capitaliste, anti-showbusiness et anarchiste.
Электрические партизаны – Национальный вопрос
Национальный вопрос прикрывает проблемы
Общества, блядства и потребительства.
Национальный вопрос всегда поощрён
Политикой партии и правительства.
Расселяют горцев по равнинам России,
Чтобы в империи остался Кавказ.
Они не горцев самих не спросили,
Они не спросили даже у нас.
Но есть ли здесь тот, кого не коснётся?
И есть ли здесь тот для кого не всерьёз?
А над империей вырос тем временем,
Словно ядерный гриб, национальный вопрос. |
La question nationale masque des problèmes
Société , de la dépravation et du consumérisme.
La question nationale est toujours titillée
Par la politique du parti et du gouvernement.
On installe des montagnards dans les plaines de la Russie,
Pour que l’empire reste dans le Caucase.
Les montagnards on leur demande pas leur avis
Et même à nous, ils ne nous ont pas demandé.
Mais y a-t il ici quelqu’un que cela ne touche pas?
Et y a-t il ici quelqu’un qui ne prend pas ça au sérieux?
Mais sous l’empire a grandi en même temps,
Comme un champignon atomique, la question nationale. |
Имперский роль-фюрер открыто объявляет себя фашистом
И всё чаще « майн кампф » достаёт с книжной полки.
«Россия для русских!» – а за спиной смеётся
Германский наци с косой чёлкой.
Это не просто зиги кидать со сцены,
Это не просто, когда свастики на обложке.
Твои дела поважней чем Химкинский лес, надевай элегантную форму СС
И пой про царя и бога, скача на одной ножке. |
Le rôle impérial de Führer se déclare lui-même ouvertement fasciste
Et de plus en plus «Mein Kampf» est tiré de l’étagère.
« La Russie aux Russe » – mais derrière rit
Un nazi allemands avec une frange oblique.
Ce n’est pas facile de lancer des Zig Heil de la scène,
Ce n’est pas facile quand il y a des croix gammées sur la couverture.
Tes affaires sont plus importantes que de la forêt de Khimki, enfile un élégant uniforme de SS
Et chante sur le Tsar et Dieu, en sautant sur une jambe. |
А на голгофских крестах два вора,
И где-то между ними, между ними Христос.
А над нашей страной кровавой зарёй
Снова мрачно встаёт национальный вопрос. |
Et sur la croix du Calvaire il y a deux voleurs ,
Et quelque part entre les deux, entre eux le Christ .
Et dans notre pays par l’aube sanglante
A nouveau se lève lugubrement la question nationale. |
И я живу здесь то ли 40, то ли 50 лет,
Но не стал ни немцем, ни евреем,
Ни даже афро-американцем.
И в последнее время мне что-то совсем расхотелось
Быть русским, уж лучше я буду
Анархо-ингерманландцем! |
Et je vis ici depuis soit 40 soit 50 ans,
Et ne suis devenu ni allemand , ni Juif,
Et même pas afro-américain.
Et ces derniers temps je n’avais vraiment plus envie d’
Etre russe, je préfère être
Anarcho- Finnois d’Ingrie ! |
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